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Quelle alternative démocratique pour l’Algérie ?

La Provence 10/3/19

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N’ayant connu que l’image momifiée d’un président fantôme, des centaines de milliers de manifestants algériens ont décidé de conjurer la peur d’un régime policier et ce sentiment de lassitude qui cherchait une issue dans des rêves bardés de visas.
Majoritaire dans la population,  la jeunesse se réveille. Forte de deux millions d’étudiants, dont beaucoup ne trouvent aucun débouché, la société algérienne semble ne plus vouloir baisser les bras. Traumatisée par une guerre civile qui a fait près de 200 000 victimes dans la décennie 90, elle s’était tenue à distance des « printemps arabes » qui ont agité ses voisins. La jeunesse, qui n’a pas vécu cette période, n’a plus les appréhensions de ses aînés.
Faire renoncer Bouteflika à un cinquième mandat présidentiel ? Certes. Mais pour déboucher sur quoi ? L’opposition démocratique est laminée. Les militaires qui tirent les ficelles du pouvoir depuis des années se livrent une lutte larvée. Et les islamistes, très présents dans les quartiers populaires, sont en embuscade.
Bientôt privé d’une  rente pétrolière qui achetait la paix sociale, le pays s’enfonce dans le marasme. Et les deux grands piliers de la société algérienne semblent se défier. Les militaires sont omni présents dans le paysage et les mosquées prolifèrent comme fleurs au printemps. Symbole de cette  montée en puissance de l’islam, la grande mosquée d’Alger, avec son impressionnant minaret de 265 m de haut et une capacité de 120 000 fidèles, est en passe d’être inaugurée. Gage donné aux religieux par un pouvoir à bout de souffle.
Pour l’heure, il s’agit de sauver la face d’un pays sans timonier depuis des années. La protestation prend pourtant une ampleur inattendue. Tous les scénarios restent ouverts.
Mais quelle alternative possible ? La société algérienne recèle des ressources insoupçonnées. Notamment chez les jeunes. J’ai pu le constater lors de l’encadrement d’un stage d’écriture journalistique à Alger, où il s’agissait de débusquer les créations économiques et culturelles d’une jeunesse inventive.
Reste à savoir si ce mouvement, aux accents de révolution de velours, peut se structurer. Ya-t-il des organisations ou des personnalités qui peuvent incarner ce désir profond de renouveau ? Sans qu’il soit dévoyé ou confisqué par des forces occultes, tapies dans l’ombre ? J-C. Escaffit La Provence 10.3.19