Archives mensuelles : avril 2022

Guerre d’Algérie : « halte au feu » mémoriel

La Provence 13.03.22
Il est des mémoires qui saignent longtemps après le silence des armes. Cela fera soixante ans, le 18 mars, que les accords d’Evian ont été signés, mettant théoriquement fin aux combats sur le sol algérien. Et pourtant, la guerre mémorielle n’est toujours pas éteinte. Mémoire éclatée chez nous, mémoire confisquée en Algérie.
A défaut d’avancer avec le régime actuel d’Alger, l’ambition du rapport Stora a été de réconcilier les mémoires antagonistes de sept millions de Français concernés (soldats appelés, pieds-noirs, harkis, enfants d’immigrés…).
 Les préconisations du rapport remis en janvier 2021au président de la République,  prennent en compte – c’est nouveau – la diversité des blessures. Il n’y a pas de bon ou mauvais côté de la souffrance. Et il n’est de devoir de mémoire sans devoir de vérité.

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Ainsi depuis un an, une quinzaine de propositions ont été mises en œuvre par le président français : reconnaissance de la torture et de l’assassinat par l’armée française de l’avocat Boumendjel, création d’une commission Mémoire et vérité et d’un musée France-Algérie à Montpellier, accès simplifié aux archives de l’armée, érection (perturbée) à Amboise d’une statue d’Abdelkader, héros de la résistance algérienne et défenseur des minorités chrétiennes en Orient. A l’automne  2021, c’est la demande de pardon envers les harkis pour les avoir abandonnés après-guerre, la reconnaissance du massacre de manifestants algériens par la police française, en octobre 1961 à Paris. Gestes forts qui se poursuivent par la reconnaissance, en janvier dernier, de la souffrance de près d’un million de rapatriés…
Vers une histoire partagée
Mesurettes démagogiques tous azimuts, railleront certains. Travail pédagogique incessant vers une Histoire partagée, rétorque l’auteur du rapport. Cette politique des petits pas et de passerelles entre des mémoires fragmentées a aussi ses limites. Comment construire un récit commun avec des anniversaires consensuels ? Le 19 mars 1962, date du cessez-le-feu en Algérie ? Pas évident de célébrer l’anniversaire d’un événement qui est loin d’avoir marqué l’arrêt des violences. Le choix d’événements mémoriels est révélateur de notre rapport à l’Histoire et de notre volonté d’envisager un destin commun. Un sacré défi. Car c’est bien connu, les blessures, les rancœurs et les humiliations tapies dans les mémoires font le lit des régimes autoritaires, avec leur cortège de menaces vengeresses.

Peut-on prouver scientifiquement l’existence de Dieu ?

La Provence 31.1. 21 :
C’est une vieille question qui passionne toujours autant. En prétendant « révéler les preuves modernes de l’existence de Dieu » , Michel-Yves Bolloré et Olivier Bonassies  signent un best-seller. A partir des découvertes de la biologie, de la physique, du Big Bang…  les auteurs de « Dieu, la science, les preuves » (Ed. Guy Trédaniel, 580 p.) concluent à l’existence d’un Dieu créateur : « Si l’univers a un commencement, c’est qu’il a une cause qui le précède« .

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Panorama intéressant des rapports entre science et foi, l’ouvrage ne révèle rien de très nouveau pourtant. Mais ses conclusions péremptoires créent un malaise jusque chez des scientifiques chrétiens qui décèlent en plus des inexactitudes dans ce livre. Et l’astrophysicien Raphaël Duqué d’affirmer dans La Croix qu’il «  dessert autant la science et la foi ».
Depuis l’Antiquité, les preuves de l’existence de Dieu balisent l’histoire de la pensée. Comme chez Aristote avec sa recherche des causes du mouvement, St Thomas d’Aquin au XIIIe siècle… jusqu’aux frères Bogdanoff, dernièrement. Pas toujours convaincantes pourtant. A l’inverse, les preuves de l’inexistence de Dieu ne sont pas plus décisives. Comme la tentative du biologiste prix Nobel, Jacques Monod, avec son livre « Le Hasard et la nécessité ». Match nul, en somme ! En faisant de « la science, une nouvelle alliée de Dieu », qui relègue la philosophie matérialiste dans l’obscurantisme, on risque aujourd’hui de faire du scientisme à l’envers.
Certes, la foi judéo-chrétienne doit passer au tamis théologique de la rationalité,  mais elle n’a rien à voir avec la croyance en un « dieu horloger ». Elle est de l’ordre de l’expérience existentielle, de la relation, de l’émerveillement devant la beauté du monde. Si  la plupart des scientifiques croyants concilient leur foi avec leur exigence professionnelle, ils ne les confondent pas pour autant. Même l’abbé Lemaître, le père du Big Bang, s’est élevé contre tout concordisme qui cautionnerait les écrits bibliques scientifiquement. En fait, les démonstrations apologétiques qui s’affrontent butent sur l’insondable mystère du sens de l’existence. Alors que la science ne peut s’en tenir qu’au « comment », la vertigineuse  question du « pourquoi » ne sera jamais résolue scientifiquement. Pourquoi existons-nous ? Pourquoi l’univers ? Pourquoi y a t-il quelque chose et pas rien ? Et ce n’est pas demain que se tariront les interrogations sur ce problème sans fond !