La Provence 31.1. 21 :
C’est une vieille question qui passionne toujours autant. En prétendant « révéler les preuves modernes de l’existence de Dieu » , Michel-Yves Bolloré et Olivier Bonassies signent un best-seller. A partir des découvertes de la biologie, de la physique, du Big Bang… les auteurs de « Dieu, la science, les preuves » (Ed. Guy Trédaniel, 580 p.) concluent à l’existence d’un Dieu créateur : « Si l’univers a un commencement, c’est qu’il a une cause qui le précède« .
Archives de catégorie : Archives : réflexions, événements passés
Guerre d’Algérie: les mémoires saignent encore.
Ouest-France 19.03.2022.
Lire in bas de page du journal
L’Histoire ne cesse de nous l’enseigner. Les guerres finissent rarement avec les cessez-le-feu, même quand ceux-ci sont respectés. Il est des mémoires qui saignent longtemps après le silence des armes. Cela fait soixante ans, le 18 mars, que les accords d’Evian ont été signés, mettant théoriquement fin aux combats sur le sol algérien.
Et pourtant, la guerre mémorielle n’est toujours pas éteinte. Non seulement entre les deux rives de la Méditerranée, mais aussi dans le cœur des Français. On a eu souvent l’impression, au gré des récits et commémorations, de ne pas évoquer la même guerre. Même à l’intérieur de nos frontières.
Mémoire éclatée chez nous, mémoire confisquée en Algérie. Elle est devenue pour le pouvoir héritier du FLN une “rente ” destinée à masquer ses propres incuries. A défaut d’ avancer avec le régime actuel d’Alger, l’ambition du rapport Stora a été de réconcilier les mémoires antagonistes de sept millions de Français concernés (soldats appelés, pieds-noirs, harkis, enfants d’immigrés…).
Pas de bon ou mauvais côté de la souffrance
Changement notoire, les préconisations du rapport remis au président de la République en janvier 2021 prennent en compte les blessures dans leur diversité. Il n’y a pas de bon ou mauvais côté de la souffrance. Et il n’est de devoir de mémoire sans devoir de vérité.
Ainsi, depuis un an, une quinzaine de propositions plurielles ont été mises en œuvre par le président français. D’abord, c’est la reconnaissance de la torture et de l’assassinat par l’armée française de l’avocat Ali Boumendjel. Comme quelques mois plus tôt, la démarche d’Emmanuel Macron auprès de la veuve de Maurice Audin, jeune militant français pro FLN disparu. Ce sera aussi l’annonce de l’accès simplifié aux archives de l’armée, la mise en place d’une commission Mémoire et vérité, la construction d’un musée France-Algérie à Montpellier, l’érection (perturbée) à Amboise d’une statue d’Abdel-Kader, héros de la résistance algérienne et défenseur des minorités chrétiennes en Orient.
En octobre 2021, le président poursuit sa politique d’apaisement mémoriel, en qualifiant de « crimes inexcusables pour la République », il y a 60 ans, le massacre à Paris de manifestants algériens par la police française. Juste avant, c’est une demande de pardon envers les harkis pour les avoir abandonnés après-guerre. Puis en janvier dernier, la reconnaissance officielle de la souffrance de près d’un million de Français d’Algérie, qui ont quitté la terre natale après la signature des accords d’Evian.
Blessures et rancœurs font le lit des régimes autoritaires
Catalogue tous azimuts, railleront certains. Travail pédagogique incessant vers une Histoire partagée, rétorque Stora, l’auteur du rapport. Cette politique des petits pas qui veut ériger des passerelles entre ces mémoires fragmentées a aussi ses limites. Comment construire un récit commun avec des anniversaires consensuels ?
Impossible de se mettre d’accord par exemple, sur une commémoration de fin de conflit. Le 19 mars 1962, date du cessez-le-feu en Algérie ? Pas évident de célébrer l’anniversaire d’un événement qui est loin d’avoir marqué l’arrêt des violences. Quelle autre date alors ? Le choix d’événements mémoriels est révélateur de notre rapport à l’Histoire et de notre volonté d’envisager un destin commun. Un sacré défi. Car c’est bien connu, les blessures, les rancœurs et les humiliations tapies dans les mémoires font le lit des régimes autoritaires, avec leur cortège de menaces vengeresses.
(1) Auteur de Sur les traces du père. Questions à l’officier tué en Algérie (1) Préface de Yasmina Khadra (Salvator).
Avec Stora aux écrivains de Fuveau et sur RCF
Le pays invité cette année étant l’Algérie, dialogue avec l’historien Benjamin Stora, auteur du rapport pour une réconciliation des mémoires France-Algérie, commandé par le président de la République.
Sous les platanes de Fuveau, le 32eme salon littéraire du Pays d’Aix, 4 et 5 septembre 2021. Podium du café littéraire Voir l’événement des écrivains en Provence.
L’historien incontournable de l’Algérie, qui a eu l’oreille de tous les présidents de Mitterrand à Macron. Cf in Ouest-France, les suites du rapport remis au président de la République.
Stora se confie également à Jean-Claude Escaffit sur les ondes de RCF à propos de ses racines de juif pied-noir et son itinéraire de chercheur .
Retrouvons l’esprit de Noël et son message universel
Le ridicule ne tue pas, grâce au ciel ! Une technocrate européenne a proposé en novembre dernier de bannir le mot « Noël » de nos fêtes et échanges de fin d’année. Si ce guide de communication interne a été aussitôt retoqué par les instances de la commission de Bruxelles, il interroge sur une tendance qui voudrait, surtout en France, aseptiser les vœux entre différentes traditions spirituelles, bouter les crèches hors des espaces publics, interdire les sapins des écoles de la République…
Lutter contre le fanatisme dans les religions
La Provence 28.11.21. Intégrisme, radicalisme, djihadisme, séparatisme… Dans la famille des mots en « isme » qui sonnent souvent commedes maladies contemporaines, il en est un qui les embrasse tous depuis des lustres. Un mot qui sature notre actualité de sinistres exemples religieux, politiques et même sportifs : fanatisme !
Le Petit Robert le définit comme une « foi exclusive en une doctrine, une religion, une cause, conduisant souvent à l’intolérance et à la violence. » Si cette passion dévoyée aux accents mystiques n’est pas cantonnée aux seules religions, celles-ci en sont depuis longtemps des vecteurs privilégiés. Il existe certes une grande différence entre un fondamentaliste chrétien qui refuse de voir enseigner la théorie de l’évolution et un islamiste qui prépare un attentat suicide. Mais depuis la nuit des temps, les ressorts sont les mêmes pourtant. Quelles sont les causes du fanatisme ? Comment le combattre ?
Quand la religion est malade, selon Frère Candiard

Pédo-criminalité : on fait quoi maintenant Messeigneurs ?
Après « la sidération et la honte » pour l’Eglise catholique, on fait quoi « Messeigneurs » ? Vous êtes les premiers à vouloir tirer les leçons de ces terribles révélations : 216 000 mineurs abusés en France depuis 1950 par 3000 prêtres et religieux (3{6e8d2247ebfffa752cf2ddc5df7bc8ac5aedbce1d2c6f6869a0181304bfba48d} du clergé). Un rapport que vous avez vous mêmes commandé et financé, qui souligne les multiples défaillances de l’institution.
Identifier, réparer, prévenir les crimes et abus de pouvoir, telles sont les grandes lignes des 45 préconisations de la CIASE (Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Eglise), présidée par Jean-Marc Sauvé.

France-Algérie : Je t’aime, moi non plus.

Chronique parue dans La Provence du 5 septembre 2021
Pays invité du salon littéraire du Pays d’Aix, durant ce week-end : l’Algérie. Comme chaque année à Fuveau, un pays étranger est mis à l’honneur. Vous avez dit pays étranger ? Par sa littérature qui porte haut pourtant les couleurs de la francophonie ? Avec des auteurs majeurs comme Yasmina Khadra, Kamel Daoud, Rachid Boudjedra… Pas vraiment étranger non plus, l’Algérie, par la présence sur notre sol des migrants et de leurs enfants (estimés à 4 millions selon certaines sources), souvent de nationalité française. Si certains défraient dramatiquement la chronique ou se sentent laissés pour compte, ils sont cependant légion à afficher de discrètes mais éclatantes réussites, dans la culture, l’économie, la médecine…
Seulement voilà, les relations entre la France et son ancienne colonie restent passionnelles. Une affectivité qui s’exacerbe à l’aune des fascinations et des rancœurs. « Je t’aime, moi non plus », en somme. Cette attraction-répulsion s’explique à la fois par une immuable proximité et par une histoire compliquée.
Edgar Morin, 100 ans : Pour une éthique de l’info.
En hommage aux 100 ans, de ce philosophe-anthropologue toujours actif, voici le texte lumineux d’une intervention devant les lecteurs et la rédaction de La Vie que je lui avais demandée en avril 2008. En quoi le travail du sociologue peut-il rejoindre celui du journaliste ? Merci et tous mes vœux, cher Monsieur Morin !
« L’événement, c’est l’écume de la réalité. La sociologie ne s’y intéresse pas. Les sociologues sont des gens prudents. Ils font leur prévision rétrospectivement, une fois l’événement passé ! En étant l’instigateur d’une sociologie du présent, je fais partie d’une espèce particulière. Je m’appuie sur des évènements pour tenter de déchiffrer des réalités, L’événement apportant une certaine surprise, que ce soit Mai 68, l’attentat du 11 septembre, l’éclatement du communisme, nous montre que nos structures de compréhension n’ont pas bien fonctionné. Il nous oblige à réviser notre façon de penser. Déchiffrer l’événement, c’est fondamental. Et c’est le travail du journaliste, qui est en tête à tête avec lui. Faire des articles à chaud, c’est prendre des risques. J’en sais quelque chose, puisque j’ai été amené à en faire en 1968. Je vois des rapports de cousinage entre ma façon d’être sociologue et le journaliste. Le travail du journaliste qui doit déchiffrer l’essentiel, n’est-il pas plus difficile aujourd’hui, dans cette montée de l’insignifiance et du sensationnalisme ? Quelle éthique de l’information envisager dans ce contexte ?Cela suppose d‘examiner des mots comme Information, connaissance, communication. compréhension.
Guerre d’Algérie : dates et mémoires en partage ?
La Provence 21 mars 2021

19 mars : date du cessez-le-feu dans l’Algérie de 1962. Et pourtant, « impossible commémoration consensuelle », selon Benjamin Stora dans le rapport sur la réconciliation des mémoires qu’il a rendu le 20 janvier au président Macron (1). Pas évident en effet de célébrer l’anniversaire d’une fin de conflit qui est loin d’avoir marqué l’arrêt des violences en Algérie. Mais quelle autre date retenir ? Pas question du 5 juillet 1962, marquant l’indépendance du pays en même temps que les massacres des pieds-noirs d’Oran et l’anniversaire… de la prise d’Alger en 1830.
L’Histoire a parfois d’étranges concordances. Tenez par exemple, les avenues du 8 mai 1945, qui fleurissent dans de nombreuses villes algériennes, ne célèbrent pas la fin de notre Seconde Guerre mondiale. Mais les massacres de Sétif et Guelma, événement traumatique pour tout un peuple, faisant murir chez certains un violent désir d’indépendance.
Le choix d’événements mémoriels, de part et d’autre de la Méditerranée, est révélateur de notre rapport à l’Histoire et… au présent. En France. d’abord. Comment réconcilier les mémoires antagonistes de sept millions de personnes passionnément concernées (anciens appelés, pieds-noirs, harkis, immigrés… ) ? Mémoire éclatée chez nous, mémoire confisquée là-bas. Faute d’avoir pu collaborer avec le directeur des Archives algériennes, arrimé à la seule demande de repentance (une « rente mémorielle » du FLN pour conserver le pouvoir), Stora a cherché d’abord à guérir nos propres mémoires blessées.
Exigeant devoir de vérité
Dans un rapport qui veut sortir des pièges idéologiques et incantations abstraites, cet historien reconnu a pris pour fil conducteur un exigeant devoir de vérité, assorti d’une liste de préconisations. Certaines commencent à être mises en œuvre, comme le partage des archives françaises et l’accès à celles classées secret-défense, ainsi que la vérité sur les disparus, avec la reconnaissance de l’assassinat de l’avocat Boumendjel par le général Aussaresses.
Mais l’historien entend prendre en compte toutes les passions douloureuses. Y compris celles des rapatriés, en rapport avec leurs morts laissés là-bas. Sans oublier le sujet sensible des harkis. « Déminage ardu de la mission Stora », prédisions-nous dans ces colonnes, le 6 septembre dernier. Mission qui avance vers une Histoire partagée, une mémoire un peu moins éclatée. A petits pas. C’est à la fois sa limite, mais aussi sa force. JC Escaffit
(1) Benjamin Stora France-Algérie, Les passions douloureuses, Albin Michel 18,90 €
Séparatisme, une loi qui raterait sa cible
21.2.2021. La Provence @Jean-Claude Escaffit
C’était Mardi gras à l’Assemblée quand les députés ont adopté en première lecture le projet de loi contre le séparatisme. Privé d’un volet social pourtant annoncé, cet arsenal législatif nourrit les inquiétudes et les critiques de toutes les Eglises chrétiennes (catholique, orthodoxe et protestantes), au seuil de leur entrée en carême.
Mais pourquoi, diable, une telle opposition de la plupart des croyants (musulmans et bouddhistes s’y sont joints, pas les juifs) envers des mesures qui veulent lutter contre le radicalisme religieux et les « prêches de haine » ? Elle ne porte pas sur le respect de la laïcité, ni sur la lutte contre l’islamisme, mais sur les contrôles et sanctions infligées à toutes les associations cultuelles.