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« Sur les traces du père »

Il n’est de devoir de mémoire sans devoir de vérité.

Sur les traces du père

Questions à l’officier tué en Algérie

Par Jean-Claude Escaffit
Préface de Yasmina Khadra, écrivain algérien : « Là où les armes ont chahuté les rêves, la main fraternelle est capable de reconstruire ce qui a été détruit. (…) J’aime le livre de Jean-Claude Escaffit , pour son message fraternel, je l’aime pour sa sobriété, sa sérénité, sa stupéfiante simplicité de prouver que les ennemis d’hier ne sont pas forcément ceux d’aujourd’hui. »»
Un témoignage bouleversant guidé par une démarche de réconciliation.
Un conflit  revisité de façon originale et pédagogique.
Comme journaliste, Jean-Claude Escaffit a travaillé sur les droits de l’Homme, ainsi que sur l’Algérie.

Couverture  articles de presse

Quelques réactions de lecteurs

Jean-Pierre D (86)  : Je viens de lire le petit livre de Jean-Claude Escaffit et j’ en suis infiniment remué : transmettez lui mes félicitations pour son travail . Je suis un ancien « appelé » en Algérie où je suis resté 2 ans et malgré cela son livre m’a restitué des détails que je ne connaissais pas ou que j’ avais oubliés. Qu’ il est bon à l’ heure que nous vivons d’ entendre ce message de Fraternité. Merci à vous de diffuser des ouvrages de cohésion sociale comme celui-là.
Myriam C (13) : J’ai lu le livre Jean-Claude Escaffit. Il m’a émue. J’y ai senti un souffle qui fleurait bon l’Evangile  et je rends grâce qu’il ait eu ce courage d’aller ainsi à la rencontre d’une histoire si douloureuse. Mais j’ai aussi compris que comme pour les douleurs de l’enfantement, n’était resté ensuite que le bonheur de la vie. Merci pour ce beau témoignage.
Jean-Marie R (amazon.fr) : Une histoire touchante sur fond de guerre d’Algérie. Des larmes de l’enfant qui a perdu son papa à la guerre aux interrogations de l’adulte… Un chemin vers la mémoire et la vérité, où s’entremêlent les destins croisés des Algériens, Français, Pieds-noirs et Harkis, dans un même battement de coeur loin des clivages habituels et des manichéismes réducteurs. Une aventure singulière et universelle, qui nous parle de valeurs et d’humanité. On ne ressort pas de ce récit comme avant.
Latifa T-G (facebook) : « L’histoire de l’humanité est le récit de notre inaptitude à assimiler ce que les mufleries de l’existence nous infligent à travers les âges » Yasmina Khadra, préfaçant le livre de Jean-Claude Escaffit que je viens de dévorer. En retournant sur les traces de son père tué pendant la guerre d’Algérie et cherchant à comprendre les circonstances mais surtout le rôle joué par ce père officier des Sections Administratives Spécialisées (SAS) dans un coin enclavé de petite Kabylie, Jean-Claude a le cran de courir le risque de le faire tomber de son piédestal. Un livre super touchant ! Merci.

Réconciliation et vérité. Itw par des lycéens

Recueilli par des élèves du lycée des Chartreux à Lyon, mars 2015.

Vous sentez-vous comme un acteur de la mémoire de la guerre d’Algérie? Si oui, comment ? L’êtes-vous autant de l’Histoire?
Cela dépend de ce que l’on entend par acteur de la mémoire. Nous le sommes tous à des niveaux différents. En ce qui me concerne à propos de la guerre d’Algérie, pas directement, puisque jeune enfant à cette époque, je n’avais jamais mis les pieds sur cette terre, ni été appelé à combattre là-bas parmi  le million et demi de militaires français qui s’y sont succédé.  Je ne suis pas non plus historien. Cependant, je suis concerné à un double titre.  Ma recherche a été induite par mon parcours de journaliste ayant recueilli des dizaines de témoignages d’acteurs de la guerre. Et cela m’a amené à me poser des questions sur l’attitude d’un père qui a dû fatalement être confronté au problème de la torture, pratiquée dans tous les régiments. Le livre que j’ai écrit « Sur les traces du père – Questions à l’officier tué en Algérie » se situe au carrefour de mon histoire intime et de la grande Histoire. 

La torture est-elle toujours un sujet tabou ? Et un sujet qui divise ? 

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Cela a été très longtemps tabou. Au niveau officiel, les autorités politiques et militaires ont pratiqué le déni. Depuis une vingtaine d’années, de nombreux témoignages sont parus dans les médias, dont  ceux pour qui j’ai travaillé, La Croix et La Vie. Ces témoignages ont aussi contribué à libérer la parole et permis d’avouer la honte d’appelés du contingent qui en avaient été des témoins souvent passifs, voire des complices. Très souvent, ils n’avaient jamais parlé à leurs proches de cette guerre traumatisante. Si la torture n’est plus un tabou, elle reste un sujet très douloureux et un facteur de division… même si on trouve peu de monde aujourd’hui pour la justifier pleinement, du moins publiquement.

Votre point de vue sur la guerre a-t-il évolué avec le temps ? Si oui, de quelle manière ?
Fatalement, entre l’enfant qui en voulait à ceux qui lui avaient enlevé son père et l’adulte qui a forgé de solides amitiés algériennes… Mais ce qui a fait le plus évoluer ma vision, c’est de travailler sur les origines de cette guerre, sur ses causes et donc sur la question de la colonisation. On se rend compte que le divorce avec ceux que l’on appelait les Français musulmans remonte à très loin, notamment à la fin de la guerre de 14-18, voire avant. Et l’on est surpris de constater rétrospectivement la cécité des politiques devant le fossé qui n’a cessé de se creuser, souterrainement, pendant les décennies suivantes.

Etes-vous favorable à une repentance de l’Etat français réclamé par l’Etat algérien?
Non. Pas plus que d’inscrire les côtés positifs de la colonisation dans nos manuels scolaires. C’est une manière d’instrumentaliser l’Histoire à des fins partisanes. Se repentir d’avoir colonisé l’Algérie ? C’est un fait historique. Comme les conquêtes des deux Amériques, les conquêtes arabes ou l’occupation romaine de l’Europe. En revanche, je pense que la France pourrait dire officiellement ses regrets sur des exactions, des discriminations,  des confiscations de terre dont ont été victimes les populations autochtones. Sortons d’incantations abstraites pour parler de faits précis. Un peu comme l’a fait le président Chirac à propos de la rafle du Vel d’hiv, en 1942 à Paris, ce qui permettait de reconnaitre ainsi la collaboration de l’Etat français avec l’occupant nazi.

Quel est votre jugement sur la vision du FLN en Algérie ?
Le Front de Libération national algérien se sert de la colonisation et de la guerre d’indépendance pour faire oublier les problèmes internes. En Algérie, c’est un unanimisme de façade qui fait perdurer le mythe fondateur de l’Etat algérien et qui permet le maintien du parti au pouvoir. Avec des chiffres fantaisistes sur le nombre de morts. Les manuels officiels algériens parlent d’un million et demi, alors que les historiens sérieux des deux pays s’accordent sur une fourchette de 300 à 400 000 pour l’Algérie contre 30 000 côté français. Il y a aussi des propos incantatoires sur le soulèvement spontané de tout un peuple autour du  FLN, de son drapeau, de ses martyrs et de ses héros. La réalité est assez différente. Il faudra bien un jour que le pouvoir algérien reconnaisse ses guerres intestines et ses exactions. Il n’y a pas de devoir de mémoire, sans devoir de vérité. C’est ce que je plaide de part et d’autre de la Méditerranée.

Les lobbies mémoriels sont-ils une réalité selon vous ? Ont-ils un poids important?
– Oui, en France comme en Algérie. Ils sont révélateurs d’une certaine vision de l’Histoire et de  la  volonté de la réécrire. Au gré des commémorations et des récits, on a parfois l’impression de ne pas évoquer la même guerre, d’évoluer dans des décors différents. En ce sens, on peut parler de guerre des mémoires.

Le temps d’oubli après la guerre était-il nécessaire selon vous ? Revendiquez-vous un droit à l’oubli ?
Oui si l’oubli n’est pas l’amnésie. Malheureusement, on a longtemps été dans le déni, dans l’occultation de la réalité. Ces traumatismes refoulés n’ont fait que raviver blessures secrètes et ressentiments tenaces. Il serait temps de regarder notre histoire en face.Une manière de considérer ensemble nos responsabilités. Non pour renvoyer l’autre à ses torts et ses errements. Mais pour solder les comptes de nos propres histoires. C’est la condition nécessaire d’une mémoire apaisée qui permettrait de tourner la page.

Quel est le rôle des intellectuels dans la recherche d’un apaisement des mémoires ?
Déjà, ils permettent de prendre du recul. Des historiens des deux pays travaillent ensemble pour  une Histoire partagée. Nombreux aussi ceux qui sont engagés dans la réconciliation. Comme le grand écrivain algérien Yasmina Khadra, qui a eu un coup de cœur pour mon livre. Il a écrit dans la préface : « J’aime le livre de Jean-Claude Escaffit pour sa stupéfiante simplicité de prouver que les ennemis d’hier ne sont pas forcément ceux d’aujourd’hui. » Son père s’était battu contre le mien.
Je crois beaucoup à la possibilité d’une mémoire apaisée grâce à la génération montante des enfants et petits-enfants des combattants des deux pays. A condition d’avoir fait, de part et d’autre, un véritable travail de vérité.

Recueilli par Pierre Coquelle

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Mémoire et vérité

Réflexion
(publiée par Ouest-France et Sud-Ouest + ITW dans Midi-Libre 19 mars)

Pour dépasser la guerre des mémoires.

Autant je comprends le refus de célébrer le 19 mars 1962 qui n’a pas marqué – loin de là –  la fin des violences  en Algérie, autant je m’interroge sur les motivations de tous ceux qui veulent, comme à Béziers,  rayer cette date de nos rues et monuments. Et de nos mémoires… Comment en finir avec l’ instrumentalisation de l’Histoire  qui fait perdurer  la guerre des mémoires ?  

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 Le 19 mars 1962 – qui commémore les accords d’Evian – n’a pas fini de cristalliser rancœurs et polémiques. Cette date anniversaire d’un cessez-le feu théorique est rejetée par tous ceux qui dénoncent – à juste raison – la poursuite exponentielle des violences en Algérie. Mais quelle date choisir pour  célébrer la fin de ce conflit qui a traumatisé des générations de Français ? Pas question de retenir non plus le 5 juillet 1962, marquant l’indépendance du pays en même temps que les massacres des pieds-noirs d’Oran et… l’anniversaire de la prise d’Alger en 1830. L’Histoire a parfois d’étranges concordances ! Par défaut, une « Journée nationale d’hommage aux morts pour la France en Algérie » a alors été choisie… le 5 décembre. Cette date hors sol, sans aucune signification historique, est bien l’illustration de la guerre des mémoires qui perdure chez nous. Et à fortiori de part et d’autre de la Méditerranée.
Le choix d’événements mémoriels est révélateur de notre vision de l’Histoire. A l’évidence, celle-ci est éclatée, pour ne pas dire schizophrénique. En France, on voit poindre une mémoire communautarisée où « chacun regarde l’histoire de l’Algérie, à travers son vécu, son appartenance familiale  », comme le souligne l’historien Benjamin Stora (1). En Algérie, c’est un unanimisme de façade qui fait perdurer un mythe fondateur et… le maintien du parti au pouvoir. Pas question de dévier des propos incantatoires sur le soulèvement spontané de tout un peuple autour du  FLN, de son drapeau, de ses martyrs et de ses héros.
Je me suis rendu souvent outre-Méditerranée, ces deux dernières années, pour mon livre, « Sur les traces du père – Questions à l’officier tué en Algérie ». La population a tourné la page de sa « guerre de Libération ». Pour les moins de cinquante ans, c’est 14-18. Et pour les plus âgés, la mémoire est en voie d’apaisement. Les pieds-noirs, « de retour au pays », peuvent témoigner de l’accueil chaleureux de la population. J’ai aussi assisté à d’émouvantes scènes de fraternisation entre combattants qui avaient été pourtant sur le même théâtre d’affrontement. Dans ma propre quête de vérité, j’ai bénéficié d’une étonnante chaîne de solidarité, d’amis et d’inconnus algériens. Ce qui nous a permis, à mon frère et moi, de nous rendre en Petite Kabylie sur les lieux – assez risqués aujourd’hui -où est tombé notre père, chef de poste SAS. Et de rencontrer, par un surprenant hasard, l’un des auteurs de l’attentat qui lui a couté la vie.
Entre les peuples et leurs dirigeants, le fossé reste grand. Englués dans des débats surannés ou doctrinaires, ballotés par des intérêts divergents et des lobbies influents, nos gouvernants respectifs n’ont cessé d’instrumentaliser l’Histoire. Au gré des commémorations et des récits, on a parfois l’impression de ne pas évoquer la même guerre, d’évoluer dans des décors différents. Même à l’intérieur de nos frontières. Il serait temps d’enterrer la hache de guerre du souvenir qui ne fait que raviver blessures et ressentiments.
A défaut d’une vision commune, ne peut-on aller vers une Histoire partagée ? Une manière de regarder ensemble nos responsabilités. Non pour renvoyer l’autre à ses torts et ses errements. Mais pour solder les comptes de nos propres histoires. C’est davantage possible aujourd’hui avec la génération montante des enfants. Et c’est en tout cas la condition nécessaire d’une mémoire apaisée. Car il n’est de devoir de mémoire, sans devoir de vérité.
(1) « Guerre d’Algérie, Mémoires parallèles », Le Monde hors-série de février-mars 2012.

Livre Couv et 4e

 ARGUMENTAIRE éditeur
Il n’est de devoir de mémoire sans devoir de vérité. C’est ce qui a guidé l’auteur dans ce récit émouvant. Jean-Claude Escaffit revisite de façon vivante toute la guerre d’Algérie, à partir d’une histoire personnelle. Il est parti sur les traces de son père, un officier SAS, tué pendant la guerre d’Algérie, il y a demi-siècle. L’auteur a fouillé les archives et a recueilli de nombreux témoignages des deux côtés de la Méditerranée. Il a également fait le voyage en famille dans une zone aujourd’hui contrôlée par les djihadistes. Et par un incroyable hasard il a rencontré l’un des meurtriers du capitaine Escaffit.
Lorsqu’il a entrepris ce récit, l’auteur ne savait pas ce qu’il allait trouver au bout du chemin. Un chemin bordé de larmes, de révélations bouleversantes, mais balisé par une étonnante chaîne algérienne de solidarité. A la veille du 60ème anniversaire d’un conflit resté traumatisant, ce récit fascinant veut être un message de réconciliation et de paix de part et d’autre de la Méditerranée.
L’AUTEUR Jean-Claude Escaffit a été journaliste à La Croix et à La Vie, et a régulièrement collaboré à diverses chaînes de télévision. Il a réalisé au Jour du Seigneur-France 2 un film documentaire sur Pierre Claverie, l’évêque d’Oran assassiné en 1996. Et a publié au Seuil « Histoire de Taizé ».
ISBN : 9782706 711 947 – 160 p. – 16 octobre 2014 – 18 €
Éditions Salvator 103, rue Notre-Dame-des-Champs 75006 Paris
TEL 01 53 10 38 38 – www.editions-salvator.com
Contact presse Thomine Josseaume
 e-mail : tjosseaume@editions-salvator.com

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